Rapport
Portrait de l’immigration au Québec
L’intégration économique à la hausse… mais les besoins aussi
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Communiqué de presse
En raison des récents développements du marché du travail et des changements apportés à certaines approches de la politique d’immigration, cette note de recherche vise à brosser un portrait plus à jour de l’immigration et à formuler des recommandations afin d’améliorer les stratégies d’attraction, d’intégration et de rétention des immigrants au Québec.
Voici les grands constats tirés de cette analyse :
Le marché du travail est de plus en plus serré et cette tendance devrait persister au cours des prochaines années.
- Le nombre de chômeurs par poste vacant soit, le nombre de personnes disponibles pour travailler par rapport à la demande des employeurs, ne cesse de chuter, de telle sorte qu’il y avait moins d’un chômeur par poste vacant à la fin de 2021.
- En 2021, les ratios de chômeurs par poste vacant étaient inférieurs à la moyenne québécoise dans des régions comme la Côte-Nord-et-Nord-du-Québec, la Capitale-Nationale, Chaudière-Appalaches, le Bas-St-Laurent et l’Abitibi-Témiscamingue.
- Le ratio entre les entrants potentiels sur le marché du travail (les 20 à 29 ans) et les sortants potentiels (les 55 à 64 ans) n’a jamais été aussi faible au Québec. Il se situe actuellement à 0,8 (alors qu’il s’élevait à 1,3 il y a 20 ans). La presque totalité des régions affiche aujourd’hui des ratios qui oscillent entre 0,4 et 0,8 sauf les régions administratives de Montréal (1,3) et du Nord-du-Québec (1,5).
- Depuis 2011, la présence sur le marché du travail des immigrants reçus s’est accrue : de telle sorte qu’en 2021, ils occupaient 19,2 % des emplois au Québec.
- La RMR de Montréal, qui compte 85 % de l’ensemble des immigrants en emploi au Québec, a, quant à elle, vu passer sa part de l’emploi occupée par les immigrants de 21,2 % à 30,7 % entre 2011 et 2021.
Malgré les reculs pandémiques, la situation des immigrants sur le marché du travail s’est nettement améliorée.
- Le taux de chômage des immigrants âgés de 25 à 54 ans diminue sans cesse depuis 10 ans au Québec (exception faite de la période 2020-2021 dû aux impacts causés par la pandémie de COVID-19 sur le marché de l’emploi). Alors qu’il s’élevait à 12,7 % en avril 2012, le taux de chômage des immigrants de 25 à 54 ans a chuté à 5,3 % en avril 2022, ce qui représente une baisse importante de 7,4 points de pourcentage.
- L’écart entre le taux de chômage des immigrants au Québec et celui des immigrants de l’Ontario et de la Colombie-Britannique s’est aussi considérablement réduit. Ainsi, alors qu’en avril 2012, l’écart du taux de chômage avec l’Ontario était défavorable pour le Québec de 4,5 points de pourcentage; en avril 2022, le Québec affichait un taux de chômage moindre que celui de l’Ontario de 0,3 point de pourcentage, un important renversement de la tendance.
- Le taux d’emploi des immigrants de 25 à 54 ans est passé de 69,9 % à 81,9 % entre avril 2012 et avril 2022, rattrapant ainsi celui de l’Ontario (81,4 % en avril 2022) et égalisant pratiquement la Colombie-Britannique (82,1 % en avril 2022).
- Alors qu’en 2010, le salaire reçu par les immigrants économiques au cours de l’année suivant leur admission à la résidence permanente était inférieur de près de 40 % par rapport à la médiane québécoise[1], cet écart s’était résorbé à 1,3 % en 2019, car leur salaire d’entrée a progressé plus rapidement que pour l’ensemble des travailleurs québécois.
Le Québec reçoit de plus en plus d’immigrants temporaires pour répondre à ses enjeux de main-d’œuvre.
- Entre 2016 et 2019, le solde de résidents non permanents (les immigrants dits temporaires) est passé de 12 671 à 61 668.
- Ainsi, on note un changement important dans la composition de l’immigration au Québec : alors que le solde des immigrants temporaires représentait en moyenne 9 % du solde des immigrants internationaux entre 2012 et 2016, ce pourcentage a grimpé à 64 % en 2019.
- Depuis quelques années, on assiste à la multiplication des assouplissements, des mesures et des programmes qui visent à faciliter l’attraction et la rétention des immigrants temporaires, notamment les étudiants internationaux et les travailleurs avec des profils qui correspondent aux besoins du marché du travail québécois.
- Une réflexion plus en profondeur doit toutefois être amorcée sur cette volonté de miser davantage sur l’immigration temporaire afin d’en éviter certains effets pervers. Par leur statut plus précaire, les immigrants temporaires font parfois face à des difficultés sociales et économiques auxquelles les natifs et les immigrants reçus ne sont pas confrontés (permis de travail relié à un employeur abusif ou inéquitable, conditions de travail moins favorables, méconnaissance des droits associés au permis de travail, etc.).
La régionalisation de l’immigration demeure au point mort malgré les efforts.
- Alors qu’à elle seule, la grande région de Montréal compte pour 50,5 % de la population du Québec, près de 85 % des immigrants qui arrivent au Québec s’y établissent en premier lieu. Une proportion qui a peu varié au cours des dernières années.
- 11 des 17 régions administratives du Québec ont accueilli en moyenne, de 2015 à 2019, moins de 1 000 immigrants permanents par année alors que la région administrative de Montréal en a reçu quelque 37 000.
- Ainsi, force est d’admettre que les efforts et les sommes investies pour attirer et retenir les immigrants à l’extérieur de Montréal n’ont pas porté leurs fruits. Une situation qui freine indéniablement le développement économique de plusieurs régions.
- Par surcroît, le resserrement du marché de l’emploi observé au Québec au cours des dernières années a été encore plus important à l’extérieur de la grande région métropolitaine de Montréal. Les postes vacants sont nombreux en région et la population y est plus vieillissante.
- Le gouvernement a reconnu cet enjeu et a tout récemment annoncé quelques nouvelles mesures pour y remédier. Ce rapport fournit plusieurs recommandations pour aller encore plus loin.
Les délais administratifs atteignent des sommets et s’intensifient.
- Dans tous les cas de figure, les délais d’obtention de la résidence permanente sont beaucoup plus longs au Québec que dans le reste du Canada.
- Ces attentes sont principalement attribuables au temps que le gouvernement fédéral met à traiter les aspects dont il est responsable (vérifications reliées à la santé, la sécurité et aux normes fédérales). Il consacre en moyenne 31 mois pour l’analyse d’un dossier alors que le processus global peut s’échelonner sur 37 mois.
- Cette lenteur désavantage considérablement le Québec car ces délais administratifs démesurés prolongent indûment la période d’incertitude que vivent les demandeurs et nuisent à l’attractivité et à la compétitivité du Québec, notamment au détriment de l’Ontario, qui affiche des délais beaucoup plus courts.
Daye Diallo,
Mia Homsy,
Simon Savard