Finances publiques
RAPPORT
6 min

Le carré de sable se rétrécit

Simulations de long terme des dépenses et des revenus du gouvernement du Québec

Rapport
Communiqué de presse
11 mars 2024

En bref

La présente note brosse un portrait à long terme de la situation financière du Québec. Elle repose sur une modélisation des trajectoires des dépenses et des revenus du gouvernement du Québec à l’horizon 2034-2035 effectuée à partir du modèle de prévisions du Conference Board du Canada (CBdC).

Cette analyse vise à mieux comprendre le cadre financier dans lequel le gouvernement du Québec devra évoluer au cours des prochaines années ainsi que les défis auxquels il devra faire face. Elle ne cherche pas à prévoir le cadre financier qui sera présenté le 12 mars prochain.

Revenus : un rebond de la croissance, suivi d’un ralentissement

  • Après un freinage de la croissance des revenus en 2024-2025, en raison du ralentissement économique, les simulations prévoient par la suite un rebond.

  • Entre les exercices financiers 2025-2026 et 2028-2029, la croissance des revenus s’avère plus importante que celle anticipée par l’Institut du Québec à pareille date l’an dernier, à partir du même modèle. Cet écart s’explique en partie par une augmentation de la population du Québec, plus élevée que prévue, propulsée par l’immigration temporaire.

  • À plus long terme, on s’attend à ce que la croissance des revenus soit alignée sur celle de l’économie, avec un PIB augmentant d’environ 1,6 % par an.

  • Sans intervention gouvernementale, la croissance des revenus de l’État québécois devrait ainsi ralentir après l’exercice 2028-2029 pour s’établir à environ 2,8 % par année.

Dépenses : retour à la normale à court terme mais les coûts en santé continueront d’exercer des pressions à long terme

  • Nos simulations indiquent que le coup de barre prévu au cours de l’exercice 2024-2025 limitera la croissance des dépenses à 1,1 % si les hausses salariales relatives au renouvellement des conventions collectives étaient omises du calcul, et à 2,3 % si on en tenait compte.

  • À plus long terme, la croissance des dépenses empruntera une pente ascendante, – à l’opposé des revenus, qui eux, stagneront. Ainsi, entre les exercices financiers 2028- 2029 et 2034-2035, le taux de croissance des dépenses du Québec devrait passer de 2,7 % à 3,4 %.

  • Cette croissance s’explique en grande partie par les dépenses en santé et services sociaux qui accaparent déjà près de 40 % des revenus de l’État québécois et qui affichent, en règle générale, des taux de croissance bien plus élevés que les autres postes budgétaires.

  • Le niveau de dépenses de portefeuilles en pourcentage du PIB, devrait même rester plus élevé qu’avant la pandémie.

Le renouvellement des conventions collectives ne change pas la tendance

  • Bien qu’il soit difficile d’estimer avec précision l’impact des hausses salariales relatives au renouvellement des conventions collectives dans le secteur public, les simulations permettent tout de même de tirer certains constats.

  • En tenant compte des hausses salariales dans nos simulations, les dépenses s’accroissent à un rythme plus rapide pour se situer entre 2,8 % et 3,4 % à partir de 2025-2026.

  • Toutefois, si à court terme, le renouvellement des conventions collectives a un effet indéniable sur l’augmentation des dépenses, à long terme, ce sont d’autres facteurs qui les influencent, avec en tête la croissance des coûts de santé qui entraînera une hausse des dépenses plus rapide que celle des revenus.

L’atteinte de l’équilibre budgétaire restera un défi…

  • Même sans dépenses gouvernementales additionnelles, l’atteinte de l’équilibre budgétaire restera un défi. Le solde budgétaire, après versements au Fonds des générations, devrait être négatif jusqu’en 2026-2027, que l’on considère ou non l’impact sur les dépenses des hausses salariales relatives au renouvellement des conventions collectives.

  • Les modifications apportées en 2023 à la Loi sur l’équilibre budgétaire seront probablement mises à profit au cours des prochaines années pour favoriser le retour à l’équilibre budgétaire.

  • Toutefois, à plus long terme, avec des dépenses qui augmenteront systématiquement plus vite que les revenus, le Québec devrait se retrouver en situation de déficit au sens de cette loi.

… tout comme celles des cibles de dette

  • La gestion prudente de la dette au Québec, facilitée par les lois budgétaires, ont permis de considérablement réduire le niveau d’endettement de la province.

  • Cependant, une croissance des dépenses plus élevée que celle des revenus pourrait, à long terme, compromettre l’atteinte des cibles d’endettement et ce, que les hausses salariales relatives au renouvellement des conventions collectives soient prises en considération ou non.

  • Le service de la dette devrait toutefois rester sous maîtrise et accaparer 7 % des revenus du gouvernement du Québec, soit le même niveau qu’actuellement.

  • Cette projection optimiste s’explique notamment par le fait que la dette a été renouvelée en grande partie lorsque les taux d’intérêt étaient avantageux et que dès l’exercice financier 2026-27, le taux d’intérêt implicite payé sur la dette devrait demeurer stable et peut-être même, baisser légèrement.

Avec moins de marge de manœuvre qu’avant, il faudra faire des choix

  • Comme nous l’avions déjà souligné en novembre dernier, le gouvernement ne devrait plus, avant longtemps, bénéficier de la marge de manœuvre dont il a profité au cours
    des dernières années. Cette latitude a été grandement bénéfique pour affronter la crise sanitaire et mettre en place de nouvelles initiatives.

  • Toutefois, un constat s’impose : les années à venir comporteront leur lot de défis. C’est pourquoi il faut se préparer dès maintenant aux choix difficiles qui devront être faits. Des arbitrages cruciaux sont à prévoir dans l’allocation des ressources. Notamment, il faudra éviter que les politiques budgétaires n’entravent les efforts d’amélioration de la productivité. Des priorités s’imposeront et le gouvernement aura la responsabilité de les expliquer à la population afin d’obtenir un certain assentiment social.

Télécharger