Une société où le revenu est concentré d’une génération à l’autre chez les mêmes citoyens n’est pas une société en bonne santé. À l’autre extrême, une société où le revenu de chacun est totalement égal n’est généralement pas productive. Entre ces deux extrêmes, où se situe le Québec? Quel est le portrait de l’inégalité du revenu au Québec par rapport au reste du Canada? Les Québécois à faible revenu d’aujourd’hui sont-ils tous des enfants des Québécois à faible revenu d’hier? Existe-t-il au Québec une égalité des chances qui fait en sorte que le revenu actuel des citoyens n’est pas lié au revenu de leurs parents?
Plusieurs indicateurs existent pour mesurer l’inégalité du revenu. L’un des plus couramment utilisés dans les cercles économiques est le coefficient de Gini. Depuis 25 ans, le temps d’une génération, ce coefficient a augmenté dans bon nombre de pays occidentaux. Au Canada, le Québec est parmi les provinces les plus inégales en ce qui concerne les inégalités du revenu de marché (avant redistribution, c’est-à-dire avant les impôts et le revenu provenant du gouvernement). Inversement, lorsqu’on considère le revenu après redistribution, le coefficient n’a pas bougé depuis 40 ans : le Québec est une des provinces les plus égalitaires. Cette stabilisation de l’inégalité du revenu après redistribution au Québec n’est pas sans conséquence : elle exige un important transfert de ressources pour compenser l’inégalité du revenu de marché plus élevée.
De plus, si une importante partie de la population doit se fier à la redistribution de la richesse pour assurer son revenu, elle est plus vulnérable aux changements de choix de politiques publiques. Le coût social d’une plus grande inégalité de revenu de marché est plus élevé.
Jean-Guy Côté, Sonny Scarfone, Francis Gosselin, Mia Homsy