Rapport
L’impact de la pandémie sur les finances publiques du Québec – Embellie à court terme, mais il faudra éventuellement faire des choix
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Contexte
Loin d’être un exercice de prédiction du prochain budget provincial, cette analyse vise plutôt à simuler les revenus et des dépenses de l’État, sans intervention du gouvernement pour en modifier la trajectoire. Les modélisations ont été effectuées en tenant compte des prévisions actuelles de revenus et de taux d’intérêt, combinées à une croissance des dépenses en santé (+ 4,9 % par année) et en éducation (+ 3,3 % par année) influencée par la démographie et qui sous-tend un facteur d’amélioration des services. Les simulations sont effectuées à l’aide du modèle du Conference Board du Canada.
Chiffres clés
- Échelonné sur une période de cinq ans, l’impact de la pandémie de la COVID-19 pourrait se chiffrer à environ 36 G$ pour les finances publiques du Québec. Ainsi, comparativement aux prévisions de mars 2020, l’État québécois perdrait près de 11 G$ en revenus sur cette période et accuserait une hausse de ses dépenses d’environ 25 G$.
- Selon nos projections, le portait de la situation pour les deux prochaines années est toutefois encourageant pour plusieurs raisons :
- L’économie du Québec était dans une situation très favorable à l’aube de la pandémie;
- Au cours de la crise, l’ampleur des mesures de soutien au revenu a soutenu la consommation et l’emploi, ce qui a moins affecté les revenus que prévu;
- La reprise devrait être plus vigoureuse qu’anticipé;
- Les taux d’intérêt sont très faibles et devraient le rester pour au moins quelques années.
- Cependant, cette embellie de court terme n’élimine en rien les enjeux structurels de l’économie québécoise (faible croissance de la productivité et population vieillissante), ce qui aura pour conséquence de replonger le Québec en déficits récurrents et croissants dès 2024.
- En 2025-2026, date à laquelle le Québec devrait avoir atteint l’équilibre budgétaire (au sens de la Loi sur l’équilibre budgétaire), le déficit s’élèverait à environ 6,5 G$ – après avoir effectué les versements obligatoires au Fonds des générations (FDG) –, et à 3 G$ avant ces versements. Par la suite, le déficit s’accroîtrait année après année et ne se résorberait pas de lui-même à moins que la croissance économique ne surpasse les attentes actuelles.
- Ainsi, l’équilibre budgétaire, au sens de la loi, c’est-à-dire après les versements au Fonds des générations (FDG), semble difficilement atteignable pour l’exercice 2025-2026.
- Néanmoins, nos projections montrent que le service de la dette demeure bas et que le poids de la dette se stabilise à court et moyen termes en raison des conditions d’emprunt très favorables. Toutefois, une hausse des taux d’intérêt pourrait, à plus long terme, peser lourd sur les finances publiques québécoises si rien n’est fait, en amont, pour équilibrer davantage les revenus et les dépenses.
Ce qu’il faut en comprendre
- L’anticipation d’une reprise forte et la faiblesse des taux d’intérêt donnent, à court terme, une bouffée d’air et la latitude nécessaire au gouvernement pour réaliser des investissements stratégiques qui stimuleront, à moyen terme, la productivité et la croissance économique.
- Toutefois, malgré cette conjoncture favorable à court terme, le défi du redressement des finances publiques à moyen terme demeure inévitable : la productivité défaillante du Québec et la faible croissance prévue entre 2024 et 2030, conjuguées aux pressions grandissantes sur le système de santé, entraineront immanquablement des déficits croissants.
- Ainsi, la nécessité, à moyen terme, d’équilibrer les livres demeure incontournable pour éviter une hausse du fardeau de la dette pour les générations futures et pour limiter les risques dûs à une hausse des taux d’intérêt.
- Le Québec doit se garder une marge de manœuvre pour affronter quatre défis de taille : le vieillissement de sa population, les enjeux climatiques, la désuétude de ses infrastructures et la lutte aux inégalités sociales.
- Par contre, la faiblesse des taux d’intérêt lui donne le luxe du temps. Ainsi, malgré l’accumulation de déficits sur plusieurs années, le poids de la dette et son coût demeurent stables.
- Le gouvernement dispose donc, à court terme, d’une certaine marge de manoeuvre pour financer des investissements qui permettront de soutenir la croissance économique à moyen terme. En contrepartie, des investissements pour stimuler la consommation des ménages seraient dommageables dans un contexte de forte reprise. Il faudrait plutôt agir de manière très ciblée pour soutenir les secteurs et les personnes encore affectés par la crise sanitaire, et déployer des mesures qui visent à accroître la productivité et le potentiel de croissance.
- Les dépenses en éducation et en formation semblent être le meilleur investissement car elles remplissent une mission à la fois sociale et économique : d’une part, investir dans les individus permet de réduire les inégalités sociales et d’accroître la mobilité et la cohésion sociales, et d’autre part, cela permet d’accroître la productivité des entreprises et donc le potentiel de croissance de l’économie.
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Mia Homsy,
Simon Savard