Après plusieurs années de surplus budgétaires, le gouvernement du Québec a annoncé en juin 2020 un déficit record de 14,9 G$ pour l’année en cours. Ce déficit a évidemment été causé par la première vague de la COVID-19 et l’arrêt de l’économie qu’elle a suscité. La réduction des revenus de l’État québécois provenant des impôts, des taxes et des entreprises publiques (comme Hydro-Québec), conjuguée à une augmentation nécessaire des dépenses en santé, explique en grande partie ce déficit record.
Si une reprise a été observée au troisième trimestre de 2020, le Québec affronte depuis la deuxième vague de la pandémie avec un nombre important de cas d’infection. Le gouvernement du Québec a annoncé en septembre des mesures de confinement qui, même si elles sont de moindre ampleur qu’au printemps, auront pour effet de restreindre le niveau d’activité économique et d’affecter les revenus de l’État. Cet effet variera en fonction de l’intensité du confinement imposé.
À partir d’un modèle économique qui permet de moduler les dépenses de consommation, l’Institut du Québec (IDQ), avec l’aide de la firme DAMÉCO, spécialisée en modélisation économique, a calculé l’effet sur l’économie du Québec de diverses formes de confinement liées à la deuxième vague de la COVID-19. Le modèle développé permet d’effectuer des simulations de réduction des dépenses de consommation dans les postes de consommation non essentielle, et de reconduire une partie de ces dépenses dans les mois qui suivent la fin du confinement.
Les modèles de confinement sont basés sur les observations économiques faites pendant la première vague (de mars à mai 2020). Ainsi, divers scénarios de niveaux d’intensité et de durées de confinement différents ont été testés pour le 4e trimestre de 2020. Ils permettent d’estimer le PIB nominal qui en résulte, pour ensuite déduire les pertes en revenus de taxes et d’impôts pour le gouvernement du Québec en le comparant à un scénario d’un seul confinement. Ainsi un deuxième confinement entraînerait une baisse des revenus provenant des taxes et des impôts pour l’année fiscale 2020-2021.
Cette baisse varierait entre 660 M$ et 2,1 G$, selon les scénarios de confinement retenus, en comparaison du niveau prévu s’il n’y avait eu qu’un seul confinement au printemps. Les revenus provenant des taxes et impôts seront affectées par un deuxième confinement, mais de façon relativement limitée. A priori, les 4 G$ mis en réserve par le gouvernement en juin dernier semblent suffisants pour compenser les pertes de revenus.
Un des facteurs qui expliquent la résilience des revenus de l’État québécois réside dans l’importance des mesures de soutien du gouvernement fédéral pour les individus et les entreprises. En intégrant celles-ci dans le modèle, il en ressort que la reprise de l’été 2020 et de l’année 2021, basée sur la consommation, est plus rapide et plus forte, entre autres, en raison de l’accroissement de l’épargne. Cet investissement massif dans l’économie canadienne et québécoise fait en sorte que les revenus de l’État repartent à la hausse rapidement. De plus, les mesures de restrictions économiques sont plus ciblées et ne semblent toucher en particulier que la restauration, le tourisme, l’hébergement, les arts et la culture. Les autres secteurs gèrent actuellement des contraintes plus légères, et rien n’indique que cette stratégie sera révisée.
Le rapport limite en effet son analyse aux effets d’un deuxième confinement sur les revenus autonomes excluant ceux des entreprises du gouvernement, soit ceux provenant des taxes et des impôts. Pour mesurer l’impact de la pandémie sur les soldes budgétaires, il faudra également tenir compte de son impact sur les dépenses, un exercice que nous avons exclus du rapport vu le degré trop élevé d’incertitude quant aux dépenses de l’État.
Néanmoins, tout porte à croire que les secteurs les plus affectés – et les personnes y travaillant – auront besoin de soutien financier soutenu pendant plusieurs mois. Certaines industries seront même transformées de façon durable et des commerces seront contraints à fermer leurs portes. Ainsi, bien que les résultats de nos modélisations soient rassurants quant à l’impact d’un deuxième confinement sur le manque à gagner de l’État, il nous faudra désormais attendre pour évaluer si les nouvelles seront aussi positives du côté des dépenses. Rien ne l’indique pour l’instant.
Jean-Guy Côté, Mia Homsy, Simon Savard